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 fantasm Pariso0001

 

Accord du MEDEF-

 Pas-Tout-Seul

 

(Dynamitage du Code du Travail.)

 

Menu du jour : Article 18, 20, 15 et 23

 

(Feuilleton N°8)

 

Avant-propos.  Nous voici au cœur des accords de Wagram.

Dans l'avant-propos du feuilleton 1, nous avions abordé le mécanisme de ce dynamitage du code du travail par une citation de J-C Mailly :

"Le plus grave, c'est le pacte budgétaire européen, car il entraîne une logique d'austérité. Il a été voté sans être renégocié. Pour FO, c'est un désaccord de fond. L'accord de flexibilité en découle directement." .

 

Nous avions poursuivi (feuilleton 1) en constatant que :

Ce "rétablissement du dialogue sociale" fléxi-sécuritaire, si il a été prôné par Hollande autant que par Parisot, est allé à la rencontre de la stratégie d'accompagnement social développée par une partie des syndicats emmenée par la CFDT.

 

En effet, Chérèque, conscient, l'a librement exprimé : "Quand on ouvre une négociation emploi qui va traiter des mutations économiques et du maintien dans l'emploi, moi j'appelle ça une négociation compétitivité emploi. Cela fera mal à certains mais c'est comme ça"( le 10 juillet 2012).

 

Cette stratégie d'accompagnement, le candidat Hollande l'avait initialisée en exprimant sa faveur pour le contrat face à la loi ( J-L Mélenchon l'avait pointé).

 

Or,l'édification du droit du travail repose sur une idée simple, le contrat de travail est un contrat inégalitaire. Seul la loi, qui dit l'intérêt commun protège, car le demandeur d'emploi n'est pas en mesure de discuter librement de ses clauses.

 

C'est une question de rapport de force et de position sociale, donc de lutte et de choix de classe...

 

Ainsi l'obstination du gouvernement, aisément compréhensible du fait des choix sociaux-libéraux du PS (depuis l'époque des ''transcourants'' dans les années 80, voir « En quête de gauche » de J-L Mélenchon), l'a amené à remettre sur le métier le détricotage du code du travail en continuant de promouvoir :

"la compétitivité-emploi" (sarkozyste), au travers du "maintien dans l'emploi".

 

Ainsi, la loi Fillon du 4 mai 2004 permettait déjà aux accords d’entreprises de déroger par l’adoption de dispositions moins favorables aux accords de branches.

 

Mais le salarié pouvait encore contester les modifications de son contrat de travail, et conserver l’ensemble des droits garanties par la loi en cas de licenciement .

 

C'est à cela que faisait récemment référence Sapin, lorsqu'il affirmait que les « accords de maintien de l'emploi » existait déjà.

 

Sauf que c'est inexact, puisqu' avec cet accord dit de Wagram, ce sera bien pire.

Le salarié n'est plus protégé par son contrat de travail. L’inversion de la hiérarchie des normes devient la règle. C'est-à-dire que l'accord d'entreprise moins favorable primera sur l'accord de branche et le code du travail. C'est ce qui est appelé aussi une remise en cause du principe de faveur.

 

Donc, la politique de Hollande n'est qu'une continuation perfectionniste du sarkozysme sous une nouvelle étiquette.

C'est bien l'alternance, mais pas une alternative.

 

N'oubliez pas que la troisième semaine de congés payés a été généralisée grâce à la lutte des ouvriers de Renault et grâce au principe de faveur, qui a permis d'en faire bénéficier tout le monde.

 

À contrario, vous avez sans doute constaté comment les Conti, les Général Motor de Strasbourg et les Peugeot Motocycles  s'étaient '' fait rouler dans la farine ''. Les salariés ont travaillé plus pour gagner moins et par contre, l'accord pour maintenir l'emploi n'a même pas tenu les deux ans prévus*.

 

Actuellement, vous voyez comment les directions de Renault, PSA et Good Year s'appuient sur les promesses, tout bénef de Wagram, pour essayer de faire fléchir les salariés. Et le comble, Sapin a le culot de se référer à ces coups de forces patronaux pour banaliser et dire la normalité des accords de maintien dans l'emploi.

 

Vous verrez avec l'article 18 comment le salarié sera empêché de refuser la modification de son contrat de travail, sous peine d’être licencié.

 

Bien que les ramifications de l'article 18 soient multiples, nous ne verrons conjointement que les articles 20 15 et 23.

Ce sera long, mais indispensable.

 

 

*Le délai de deux ans est une moyenne pour garder une entreprise en faisant des profits. Ceux-ci seront d'autant plus importants que l'on n'aura pas investi pour renouveler les machines. C'est la raison pour laquelle une entreprise au fur à mesure de ses rachats voit ses activités se réduire et la sous-traitance se développer, jusqu'au moment critique où elle ne peut plus fonctionner et fait faillite. C'est malheureusement souvent à ce moment-là que les salariés s'activent pour trouver des solutions coopératives.

 

 

 

 

Accords de Maintien de l’Emploi -article 18, (AME) .Licenciement collectif et Plan de Sauvegarde l’emploi /PSE -articles 20, 15 et 23.

 

 

Article 18

[ Afin de maintenir l’emploi, en cas de graves difficultés conjoncturelles rencontrées par une entreprise, il convient de se doter, à côté de dispositifs existants tels que le chômage partiel, de la possibilité de concluredes accords d’entreprisepermettant de trouver un nouvel équilibre, pour une durée limitée dans le temps,dans l’arbitrage global temps de travail / salaire/ emploi, au bénéfice de l’emploi. (...)]

 

« arbitrage global », c'est-à-dire que même si quelques lignes plus bas, il est écrit : « ces accords ne pourront pas déroger », un arbitrage global veut dire que  l'on va s'arranger par des accords d'entreprise, qui, en fait comme vous l'avez déjà compris et comme vous verrez plus loin, piétinent le contrat de travail et le code du travail.

 

 

[(...) Ces accords ne pourront pas déroger aux éléments de l’ordre public social, tels que, notamment, le Smic, la durée légale, les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires, le repos quotidien et hebdomadaire, les congés payés légaux, la législation relative au 1er mai.(...)]

 

[(...) Étant donné le champ de ces accords,qui résultent d’une négociation permettant de trouver un nouvel équilibre dans l’arbitrage global temps du travail / salaire / emploi, au bénéfice de l’emploi, ceux-ci ne peuvent être que des accords majoritaires conclus pour une durée maximale de deux ans.(...) ]

 

Ça ne tiendra ... Pas plus de deux ans ... Faut pas ''attiger'' les amis ! Vous allez gardez votre emploi un petit moment. Faut pas faire les '' fines gueules '' ! Les patrons ne sont pas des monstres ! On vous garantit un SMIC, mais vous travaillez  même plus  et vous gagnez moins. C'est gagnant-gagnant, n'est-ce pas ?Faut savoir éviter les grèves avec de bons compromis camarades ! Pour la paix et la concorde sociale avec le coude qui appuie dans la balance du côté de l'employeur. C'est équilibré, il est tout seul l'employeur.

 

 

[(...) Ces accords doivent permettre aux partenaires sociaux de l’entreprise de passer un cap difficile et de consolider le dialogue social sans en faire un cas général.(...) ]

 

Oui ! Il ne faut pas exagérer les salariés ! D'abord, on va vous en donner du dialogue social et en plus privilégié, car individuel... (Voir la suite) et on en fera un cas général !

 

[(…) Bien que s’imposant au contrat de travail, l’accord de maintien dans l’emploi requiert néanmoins l’accord individuel du salarié. (...)]

 

Le contrat de travail est piétiné et l'accord s'impose. Mais ce n'est pas suffisant pour l'employeur.

Humiliation suprême et grande violence symbolique pour le salarié.

'' L'employeur/ accord '' requiert, c'est-à-dire exige l'assentiment, le consentement du salarié. Autrement dit tu es cocu, fais au moins des efforts pour avoir l'air content. Cheeze !  Parce que sinon... (voir la suite).

 

 

[ (…)En cas de refus du salariédes mesures prévues par l’accord, la rupture de son contrat de travail qui en résultes’analyse en un licenciement économique dont la cause réelle et sérieuse est attestée par l’accord précité.(…)]

 

Son contrat de travail étant de facto  '' suspendu ''  par l'accord, c'est la capitulation sans condition, qui est imposée par l'employeur. Toute contestation du salarié est donc sans objet et au bénéfice de l'employeur. Heu ! Pardon de l'accord, c'est formulé de cette façon.

Ainsi, '' l'accord '' atteste de « la cause réelle et sérieuse »

du licenciement, qui a l'apparence du licenciement économique, mais qui n'en est pas un, puisque... (voir la suite).

 

[ L’entreprise est exonérée de l’ensemble des obligations légales et conventionnelles qui auraient résulté d’un licenciement collectif pour motif économique.(…)]

 

Le lecteur peut constater par lui-même, que le MEDEF et pas-lui-tout-seul prennent les salariés et les citoyens, à l'aide d'une logomachie toute jésuitique, pour des imbéciles avec, notamment, ce licenciement économique qui est moins que cela.

 

[ (…)l’employeur s’engage à maintenir dans l’emploi les salariés auxquels ils s’appliquent, (…) ]

 

C'est l'estocade, l'accord avec toute sa conditionnalité ne s'appliquera pas à tous les salariés d'une même entreprise. Certains seront plus égaux que d'autres devant le licenciement. Vous comprenez tous les usages possibles pour diviser les salariés et pour faire pression.

 

 

 

 

 

Article 20, licenciement collectif et homologation

[ La procédure de licenciement collectif pour motif économique et le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi sont fixés soit par accord collectif majoritaire soit par un document produit par l’employeur et homologuépar la Direccte.] (Direction gional de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi)

 

 

Article 20, paragraphe 1

[(…) L’ensemble des délais fixés par l’accord sont  des délais préfixes, non susceptibles de suspension ou de dépassement.

Toute action en contestation de la validité de l’accord doit être formée dans un délai de 3 moisà compter de son dépôt. Toute contestation portée par le salarié, visant le motif du licenciement ou le non-respect par l’employeur des dispositions de l’accord, doit être formée dans un délai de 12 mois suivant la notification du licenciement. (…) ]

 

 

 

Actuellement pour contester l’accord  ou l’homologation du licenciement,  le délai est de 12 mois. L'article 20 le réduit à 3 mois,  et à compter du dépôt de l'homologation.  Ce qui permettra à l'employeur de mener ses licenciements au pas de course..

 

Actuellement le délais donné au salarié pour contester son licenciement est de 5 ans (60 mois). Or l'article 20 réduit la présente contestation du salarié à 12 mois (1 an).

 

 

Article 20

Paragraphe 2

(…) Lorsque l’employeur recourt à la procédure d’homologation, il établit un document qu’il soumet à l’avis du comité d’entreprise, préalablement à sa transmission au Direccte.

(...) L’administration se prononce dans un délai de 21 jours sur le document et le projet de plan de sauvegarde de l’emploi. À défaut de réponse expresse dans ce délai, ils sont réputés homologués. 

À compter de la date de présentation du document au CE,la procédure s’inscrit dans un délai maximum préfixe, non susceptible de suspension ou de dépassement :

- de 2 mois pour les projets de licenciements collectifs pour motif économique concernant de 10 à 99 salariés,

- de 3 mois pour les projets de licenciements collectifs pour motif économique concernant de 100 à 249 salariés,

  • de 4 mois pour les projets de licenciements collectifs pour motif économique concernant 250 salariés et plus. (…)]

 

 

Il s'agit de l'homologation des licenciements effectuée par la Direccte. Sachez que cette organisme, qui n'est pas   par essence favorable au salarié (c'est un euphémisme), n'a   de toute façon pas assez de personnel pour examiner sérieusement les accords   qu'on lui présente.

 

L'homologation se fait par accord tacite  avec la Direccte au bout de 21 jours seulement. Dans le code du travail il n'est pas question d'accord tacite. Les délais sont fixés en fonction du nombre de licenciement.

 

 

 

[(…)La mise en œuvre des reclassements internes peut débuter à compter de l’obtention de l’homologation. (…)]

 

[(…) Toute action en contestation de l’homologation doit être formée dans un délai de 3 mois à compter de son obtention.Toute contestation par le salarié visant le motif du licenciement ou le non-respect par l’employeur des dispositions du document ayant fait l’objet d’une homologation doit être formée dans un délai de 12 mois suivant la notification du licenciement. (…)]

 

 

Comme le souhaite le MEDEF, en réduisant les délais, tout est fait pour éviter que le juge judiciaire s’en mêle, pour « sécuriser les relations de travail ». ( Nous verrons la prochaine fois dans l'article 26 comment la saisie du juge prud'homal est réduite).

 

Les modifications, introduites par l’article 20 de l’accord, facilitent les « grands licenciements » économiques et réduisent les capacités de réaction du comité d’entreprise.

 

 

 

 

Article 15 – Mobilité interne

[ (...) Le refus par un salarié d’une modification de son contrat proposée dans les conditions définies au présent article n’entraîne pas son licenciement pour motif économique. Il s’agit d’un licenciement pour motif personnel (...)]

 

Pour ne pas alourdir ce décryptage, sachez que dans les précédentes versions de l'accord, il était fixé des limites à la mobilité géographique : pas plus de 50 kilomètres ;

et des limites de temps pas plus de 45 minutes

 

Les « limites imposées » à la mobilité sont

renvoyées à la négociation dans l’entreprise. Nous comprenons parfaitement ce que cela veut dire. D'ailleurs en l'absence d'accord l'employeur peut donner l’interprétation qu'il souhaite de cet article.

 

En attendant, le salarié en incapacité d'être mobile sera licencié pour « motif personnel ».

 

 

 

 

Article 23, ordre de priorité des licenciements

[A défaut d’accord de branche ou d’entreprise en disposant autrement, en cas de licenciement pour motif économique, l’employeur est fondé, pour fixer l’ordre des licenciements, à privilégier la compétence professionnelle   sous réserve de tenir également compte, après consultation du CE, des autres critères fixés par la loi. ]

 

Nous avions déjà examiné cet article, mais il est important de prendre conscience que la compétence ne veut rien dire. Ce n'est pas un critère objectif (comme la qualification) et renforce l'arbitraire de l'employeur, qui, fort de cet article 23, peut licencier en priorité le salarié qui lui déplaît.

 

 

 

 

En bref :

L'article 18 serait en contradiction l'article 4,8,9 et 13 de la convention 158 de l'OIT.

Du fait des atteintes disproportionnées à l'économie général des contrats, l'article 18 serait anticonstitutionnel.

 

 

L'article 18, par le biais d'accords d'entreprises et sous prétexte de conjoncture,  permet au  patronat de faire travailler plus en rémunérant moins.

Les salariés qui refuseront l'accord en vertu de leur contrat de travail seront licenciés, sans bénéficier des droits relatifs au licenciement économique,  car l'accord justifiera le licenciement pour « cause sérieuse et réelle ».

C'est l'inversion de la hiérarchie des normes, le contrat prépondérant sur le code du travail, qui est remis en cause.

 

 

Grâce à l'article 20, L'homologation  se fait par accord tacite  avec la Direccte au bout de 21 jours seulement.

Comme le souhaite le MEDEF, en réduisant les délais de

contestation de l'accord et les délais de contestation des motifs de son licenciement par le salarié , tout est fait pour éviter que le juge judiciaire s’en mêle

 

 

Pour simplifier les démarches du patron, l'article 26 réduit la contestation des licenciements auprès des juges prud'homaux.

 

 

L'article 23 permet à l'employeur de choisir les premiers à licencier, suivant ''la tête du client''.

 

 

L'article 15, au nom de la mobilité interne, il sera possible de licencier le salarié, qui ne pourra pas aller travailler dans une autre ville voire à l'autre bout de la France, car aucune limite de temps et de lieu n'est donnée.

En attendant, le salarié en incapacité d'être mobile sera licencié pour « motif personnel ».

 

 

Que de régression et de précarité en quelques articles !

 

 

 

François Hollande avait appelé à la conclusion d’un « accord gagnant-gagnant » et à un « compromis historique ».

Il a aussitôt salué les accords de Wagram, qui constituent selon lui « un succès du dialogue social ».

Il a, en toute logique, demandé « au gouvernement de préparer, sans délais, un projet de loi afin de transcrire fidèlement les dispositions d’ordre législatif prévues dans l’accord ».

Son souhait est réalisé et, en avril, les parlementaires s'engageront.

Une centaine de parlementaires PS ont signé un texte de soutien à la transcription fidèle de l'ANI. La droite va soutenir la loi.

 

Ce texte n'est pas amendable à la marge.  

Parler de verre à moitié plein, parce qu'on aurait comblé les manques du texte par des amendements, n'a aucun sens. C'est la démarche et l'esprit même de cet accord, qui sont problématiques. 

Car cet accord met en cause le code du travail, la hiérarchie des normes et le principe de faveur.

Il faut le rejeter purement et simplement.

D'ailleurs, la droite et le PS ne nous laisseront pas le choix .

 

C'est effectivement un casus belli.

 

 

 

Le 10 avril, Guillaume Étiévant viendra en débattre à Boulogne.

 

Bon courage !

 

Théo DUCHON.

 

Tag(s) : #Accords MEDEF
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